Le développement des locations type « Airbnb » a rapidement donné lieu à un encadrement réglementaire avec notamment, dans certaines communes, la nécessité de demander une autorisation préalable du fait du changement d’usage – article L631-7 du Code de la construction et de l’habitation.
La sanction du non-respect de cette disposition est lourde (article L651-2 du CCH) :
« Toute personne qui enfreint les dispositions de l’article L. 631-7 ou qui ne se conforme pas aux conditions ou obligations imposées en application dudit article est condamnée à une amende civile dont le montant ne peut excéder 50 000 € par local irrégulièrement transformé.
(…)
Sur requête de la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé ou de l’Agence nationale de l’habitat, le président du tribunal ordonne le retour à l’usage d’habitation du local transformé sans autorisation, dans un délai qu’il fixe. A l’expiration de celui-ci, il prononce une astreinte d’un montant maximal de 1 000 € par jour et par mètre carré utile du local irrégulièrement transformé. Le produit en est intégralement versé à la commune dans laquelle est situé le local irrégulièrement transformé.
Passé ce délai, l’administration peut procéder d’office, aux frais du contrevenant, à l’expulsion des occupants et à l’exécution des travaux nécessaires. »
Les condamnations fleurissent, les contestations des propriétaires quant à la validité de ces sanctions aussi.
L’objectif de « lutte contre la pénurie de logements destinés à la location » est un motif d’intérêt général au regard du droit interne
Les sanctions prévues par l’article L651-2 du CCH portent-elles atteinte notamment à la nécessité et à la proportionnalité des peines (articles 7 et 8 de la DDHC) et au droit de propriété (articles 2 et 17 de la DDHC) ?
Non, selon le la Cour de cassation qui, le 5 juillet 2018 (n° 18-40014), a refusé de renvoyer cette question prioritaire de constitutionnalité au Conseil constitutionnel, aux motifs que :
- l’amende encourue constitue une sanction ayant le caractère d’une punition de sorte qu’il n’y a pas atteinte au droit de propriété ;
- l’amende est en lien direct avec l’agissement et ne paraît pas manifestement disproportionnée au regard de celui-ci et de l’objectif de lutte contre la pénurie de logements destinés à la location dans certaines zones du territoire national, lequel constitue un motif d’intérêt général ;
- l’astreinte susceptible d’assortir l’injonction de retour à l’habitation du local transformé sans autorisation n’est pas susceptible de porter une atteinte disproportionnée au droit de propriété.
… mais ne le serait peut-être pas au regard du droit communautaire ?
Ici, le propriétaire a contesté sa condamnation en invoquant la non-conformité à la directive « services ».
La Cour de cassation (15 Novembre 2018, n° 17-26156) n’a pas voulu se prononcer et renvoie à la CJUE diverses questions préjudicielles résumées ainsi :
- les locations de courtes durées entrent-elles dans le champ d’application de la directive ?
- si oui, l’objectif tenant à la lutte contre la pénurie de logements destinés à la location constitue-elle une raison impérieuse d’intérêt général permettant de justifier cette mesure nationale d’autorisation préalable ?
- le cas échéant, cette mesure est-elle proportionnée à l’objectif poursuivi ?
C’est à suivre, mais en attendant, les sanctions subsistent.