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LE NOTARIAT FACE AU VIRUS : Interview de Me David AMBROSIANO – 1er Vice Président du CSN

De nombreux notaires ont été vivement critiqués pour avoir fermé leurs études conformément aux instructions gouvernementales. Concrètement, comment concilier service public notarial et confinement ?

1ère question : fermeture au public, sauf ?

RESODINFO : les offices notariaux doivent-ils être ouverts ou fermés au public ?

Me AMBROSIANO : les études sont fermées au public depuis le 17 mars 12 h, sauf cas « d’impérieuse nécessité » comme la réception d’un testament par exemple pour une personne gravement malade. La signature d’un acte de vente, dans le contexte actuel, ne peut être considérée comme une impérieuse nécessité.

2ème question : quid du télétravail ?

RESODINFO : rédacteurs, comptables, formalistes, … tout le monde peut-il télétravailler ?

Me AMBROSIANO : Nous sommes passés en 3 jours d’environ 3.000 connexions à distance tous opérateurs confondus à plus de 30 000 !

Nous avons donc décuplé en un temps record nos capacités en télétravail, ce qui n’a pas manqué de saturer la bande passante. Cela nous a obligé à trouver des solutions techniques dans un très bref délai pour renforcer le réseau, et dans un contexte où les fournisseurs de matériels sont eux-mêmes à l’arrêt. Les équipes ont travaillé nuits et jours pour y parvenir et la situation semble s’améliorer progressivement depuis ce matin.

Néanmoins, tous les salariés du notariat ne pourront pas travailler à distance pour plusieurs raisons : faute de travail pour certains qui ont un contact nécessairement direct avec la clientèle (l’activité de négociation immobilière par exemple) ou dont l’activité est directement liée à la signature d’actes qui se font rares en ce moment, et faute de matériel suffisant à domicile pour d’autres car l’urgence de la situation n’a pas permis à tout le monde de s’organiser. Et pour les autres, qui peuvent actuellement télétravailler, l’activité va nécessairement diminuer rapidement faute de nouveaux dossiers et du fait d’une activité économique au ralenti. 

3ème question : quid de la signature à distance ?

RESODINFO : il a été reproché aux notaires de ne pas assez utiliser la signature à distance des actes authentiques électroniques. En pratique, les choses sont-elles si simples ?

Me AMBROSIANO : les choses sont plus complexes qu’elles ne le paraissent parce que cela ne dépend pas du bon vouloir du notaire mais du pouvoir réglementaire. Dans l’état actuel des textes (décret du 26 novembre 1971) le notaire ne peut recueillir à distance le consentement des parties à l’acte, même si les outils technologiques existent déjà chez les notaires. Nous travaillons d’ailleurs sur cette comparution à distance depuis plus d’un an avec la Chancellerie, notamment du fait de l’arrêt des fonctions notariales des consuls à l’étranger. Et nous avons, depuis la semaine dernière et devant l’urgence de la situation, entamé des discussions très constructives avec la Chancellerie pour obtenir un décret d’exception qui nous permettra, durant cette période, la comparution à distance de nos clients pour signer un acte authentique électronique. Ce décret devrait paraitre au JO en début de semaine prochaine nous l’espérons. Cette comparution à distance se fera au moyen d’un système de visioconférence agréé par le CSN et déjà déployé dans de nombreuses études, totalement sécurisé, et avec des procédés présentant le plus haut niveau de sécurité.

4ème question : quid des signatures par procuration ?

RESODINFO : les actes peuvent-ils être signés par procuration pour éviter les contacts ?

Me AMBROSIANO : la signature électronique, si sécurisée soit-elle, permet d’établir une procuration sous seing privé uniquement, et en aucun cas une procuration authentique. L’annexion de celle-ci à l’acte authentique n’y change rien. L’acte établi sur la base de cette procuration sera authentique, car établi par un notaire, mais le client peut en théorie contester la force probante de la procuration selon les règles relatives à la contestation des actes sous seings privés. Une telle procuration, pas plus qu’une procuration sous seing privé d’ailleurs au format papier, ne peut notamment pas être utilisée pour l’acceptation d’une donation, d’une vente en l’état futur d’achèvement ou d’une hypothèque, sui sont des actes solennels.

La signature électronique d’une procuration sous seing privé ne peut donc être utilisée que pour des actes non solennels. Elle doit être conforme au règlement eIDAS de 2014, tout comme la signature certifiée (que le règlement appelle « signature avancée »). La différence entre les deux est technique, et tient notamment aux conditions de création des instruments de signatures. Ces deux procédés supposent une vérification de l’identité du titulaire de l’instrument de signature (que ce soit par rencontre physique avec présentation d’un document d’identité, ou par envoi à distance d’une copie de ce document) ; ils permettent d’apposer une véritable signature au sens de l’article 1367 du code civil. L’article 25 du règlement eIDAS dispose que « La valeur juridique et l’admissibilité d’une signature électronique au titre de preuve ne peuvent être refusées aux seuls motifs […] qu’elle ne répond pas aux exigences des signatures électroniques qualifiées. » Et l’article 1367 du code civil admet l’emploi de tout « procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache ». La signature certifiée est ainsi couramment employée par les banques ou les compagnies d’assurances.

S’agissant des procurations sous seing privé électroniques, le CSN recommande de n’utiliser que des outils de signature de niveau « avancé » à minima, qui ne sont délivrés à ce jour que par cinq opérateurs certifiés par l’ANSII.

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