Une personne rétracte sa demande en adoption de l’enfant de son conjoint puis formule une nouvelle demande. Le consentement à adoption initialement donné par le conjoint est-il encore valable ? La Cour de cassation se prononce.
La décision
En 2016, Mme T sollicite le prononcé de l’adoption plénière de l’enfant de son épouse Mme L, laquelle y avait consenti par acte authentique. Huit mois plus tard, Mme L introduit une action en divorce et rétracte son consentement à adoption. Mme T se désiste de l’instance en adoption puis sollicite de nouveau le prononcé de l’adoption plénière.
Leur divorce est prononcé, de même que l’adoption plénière.
Mme L conteste l’adoption, invoquant la rétraction de son consentement.
La Cour d’appel – Bordeaux 6 avril 2021, n°19/03537 – valide l’adoption.
Mme L forme un pourvoi, invoquant que :
– son consentement à adoption a été annulé par le retrait de la demande d’adoption par Mme T. La nouvelle demande en adoption aurait du donner lieu à un nouveau consentement à adoption ;
– que les conditions de l’adoption doivent être réunies au moment où le tribunal statue et non au moment du dépôt de la requête en adoption (le divorce ayant été prononcé entre les deux).
La Cour de cassation – Cass. civ. 1, n° 11 mai 2023, 21-17.737, Publié au bulletin – rejette le pourvoi :
« 9. Il résulte des articles 345-1, 1°, 348-1 et 348-3 du code civil, dans leur version alors applicable, que l’adoption plénière de l’enfant du conjoint, permise lorsque l’enfant n’a de filiation établie qu’à l’égard de ce conjoint, requiert le consentement de celui-ci, lequel peut être rétracté pendant deux mois.
(…)
13. En application des articles 345-1, 348-1 et 353 du code civil, dans leur version alors applicable, le juge doit vérifier si les conditions légales de l’adoption de l’enfant du conjoint sont remplies au moment où il se prononce.
14. La cour d’appel a constaté qu’il avait été interjeté appel du jugement de divorce rendu le 12 décembre 2019 et que celui-ci était pendant, ce dont il se déduit que Mme [T] et Mme [L] étaient encore unies par les liens du mariage au moment où elle a statué.
15. Il en résulte que les conditions légales de l’adoption de l’enfant du conjoint étaient réunies au moment où la cour d’appel s’est prononcée. »
Pour consulter la décision :
Décryptage
Le présent arrêt traite de :
– la date à laquelle les conditions de l’adoption doivent être réunies,
– la durée de validité du consentement à adoption.
La Cour de cassation confirme que les conditions légales de l’adoption du conjoint doivent être remplies au jour où le juge se prononce et non au jour du dépôt de la requête en adoption.
Toutefois, en l’espèce, même si le divorce avait été prononcé, les épouses étaient encore unies par les liens du mariage compte tenu de l’appel interjeté.
Concernant la durée de validité du consentement à adoption, il résulte de l’article 348-3 du Code civil (dans sa version applicable en l’espèce – actuellement repris à l’article 348-5) que le consentement à adoption peut être rétracté pendant deux mois.
La mère invoquait que la demande en adoption ayant été dans un premier temps annulée, le consentement à adoption l’était aussi, même si la rétraction avait eu lieu après le délai de deux mois. La nouvelle demande en adoption nécessitait un nouveau consentement.
La Cour de cassation ne suit pas ce raisonnement et approuve la Cour d’appel d’avoir retenu que le consentement ne comportait aucune limite dans le temps ni ne se rattachait à une instance particulière, de telles réserves n’étant pas prévues par la loi, de sorte qu’il avait plein et entier effet.
Une fois le délai de rétraction de deux mois écoulé, le consentement à adoption est donc définitif.
En pratique, le notaire qui reçoit un consentement à adoption se doit d’insister sur ce point.