APPORT DE TITRES EN REPORT 150-0 B TER : LA PRISE EN CHARGE DE PASSIF CONSTITUERAIT UNE SOULTE ?

Une nouvelle fois, l’administration s’oppose à l’application du report d’imposition, assimilant la prise en charge d’un passif par la holding à une soulte. La Cour administrative de LYON se prononce.

La décision

En 2017, M. B apporte au capital d’une SPFPL, dont il est l’unique associé, les titres d’une SELARL. En contrepartie, il reçoit des parts de la SPFPL et bénéficie de la reprise, par cette société, du solde de l’emprunt qu’il avait personnellement souscrit pour l’acquisition des titres apportés.

A la suite de la vérification de comptabilité de la SPFPL et après dépôt par M. B d’une déclaration faisant état d’une moins-value à raison de cette opération, l’administration estime que l’intéressé a, en réalité, réalisé une plus-value, ne pouvant bénéficier du dispositif de report d’imposition prévu à l’article 150-0 B ter du code général des impôts.

La Cour d’appel – CAA de LYON, 1er juin 2023, N° 22LY00316 – donne raison à l’administration :

« En l’espèce, il est constant que le traité d’apport de parts sociales signé le 17 juin 2016 a consisté en l’échange de 450 titres de la SELARL Centre de médecine nucléaire du parc évalués à 292 500 euros contre 1 570 parts de la SPFPL B… évaluées à la somme de 157 000 euros et assorti d’une reprise par cette société du solde de l’emprunt bancaire à hauteur de 135 500 euros contracté par M. B… pour l’acquisition des titres apportés. Ainsi que l’ont jugé les premiers juges, la reprise, par la SPFPL B…, du solde de l’emprunt bancaire contracté par M. B… s’analyse en une véritable contrepartie à l’opération d’apport et doit être regardée comme une soulte au sens et pour l’application des dispositions précitées, la notion de soulte ne pouvant se limiter aux sommes reçues en numéraire par le contribuable. Par suite, c’est à bon droit que l’administration a considéré que le montant de la soulte excédant 10% de la valeur des titres reçus, la plus-value réalisée à l’occasion de cette opération d’apport ne pouvait pas bénéficier du report d’imposition prévu par ces dispositions. »

Pour consulter la décision :

https://www.conseil-etat.fr/arianeweb/#/view-document/?storage=true

Décryptage

Le mécanisme du report d’imposition prévu par l’article 150 0 B ter du CGI s’applique en cas d’apport de titres à une société contrôlée par l’apporteur sous diverses conditions, notamment tenant à l’importance de la soulte.

Le report d’imposition ne s’applique qu’aux opérations pour lesquelles le montant de la soulte reçue par le contribuable n’excède pas 10 % de la valeur nominale des titres reçus.

Lorsque la soulte reçue excède 10 % de la valeur nominale des titres reçus, la totalité de la plus-value réalisée à l’occasion de l’opération d’apport concernée est imposée immédiatement.

Entre 2000 et 2017, la pratique des soultes de « complaisance » pour sortir de la trésorerie sans fiscalité était courante.

La loi de finance rectificative pour 2016, tout en maintenant le bénéfice du sursis ou du report pour les opérations stipulant une soulte n’excédant pas 10%, a prévu que la plus-value est, à concurrence du montant de cette soulte, imposée au titre de l’année de l’apport.

Après les contentieux pour abus de droit pour les opérations d’apport de titres avec soulte de « complaisance », il semble que l’administration s’intéresse désormais aux opérations d’apport avec prise en charge de passif.

La question posée est celle de savoir ce qu’il faut entendre par « soulte » au sens de l’article 150 0 B ter.

Lorsque l’apporteur perçoit, à l’occasion de son apport, une somme d’argent, qu’elle soit perçue immédiatement ou portée en compte courant d’associé, la qualification de soulte ne pose pas de problème.

En revanche, en cas d’apport de titres avec prise en charge, par la société bénéficiaire de l’apport, d’un passif incombant à l’apporteur, la question est plus délicate.

En l’espèce, les juges ont estimé que la prise en charge par la holding du passif incombant à l’apporteur s’analyse en une véritable contrepartie à l’opération d’apport et doit être regardée comme une soulte au sens et pour l’application des dispositions de l’article 150 0 B ter du CGI.

L’arrêt précise : « La notion de soulte au sens de ces dispositions vise notamment les prestations pécuniaires ayant le caractère d’une véritable contrepartie à l’opération d’apport, à savoir les prestations qui ont été convenues à titre contraignant en tant que complément à l’attribution de titres représentatifs du capital social de la société acquéreuse et ceci indépendamment des éventuels motifs sous tendant l’opération. »

La Cour administrative d’appel de BORDEAUX s’est récemment prononcée dans le même sens s’agissant d’une opération d’apport à holding de titres reçus par donation-partage à charge de soulte, ladite soulte ayant été mise à charge de la holding.

Sur cette décision, vous pouvez consulter :

En attendant la position du Conseil d’Etat, les conseils doivent informer leurs clients du risque fiscal afférent à une opération d’apport avec prise en charge de passif.

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