L’acceptation de ce droit dans l’année du décès peut être tacite. Mais peut-elle résulter d’un maintien dans les lieux et d’une prise en charge des frais d’assurance et d’entretien ? La Cour de cassation se prononce.
La décision
Une personne décède, laissant pour lui succéder son fils né d’une première union, et son épouse séparée de biens.
Des difficultés surviennent lors du règlement de la succession.
Le fils fait grief à l’arrêt – CA Bourges Civ. 12 août 2021 – de dire que l’épouse bénéficie du droit viager au logement de l’article 764 du Code civil :
- Au motif qu’elle aurait formulé son option dans une assignation intervenue dans l’année du décès, alors qu’il n’en est rien.
- Et au motif qu’elle avait manifesté son option tacitement, ce qui était justifié par la prise en charge de factures d’assurance et d’entretien du bien, alors qu’une telle justification ne constitue pas un faisceau d’indices suffisants pour manifester une volonté non équivoque.
La Cour de cassation – Cass. 1re civ., 25 oct. 2023, no 21-23999 – lui donne raison sur le premier moyen. Concernant le second, elle répond :
« Vu les articles 764 et 765-1 du code civil :
8. Selon ces textes, le conjoint survivant dispose d’un an à partir du décès pour manifester sa volonté de bénéficier de son droit viager au logement.
9. Si cette manifestation de volonté peut être tacite, elle ne peut résulter du seul maintien dans les lieux.
10. Pour dire que Mme [L] dispose, jusqu’à son décès, d’un droit d’habitation et d’un droit d’usage sur le bien situé [Adresse 2] et sur le mobilier le garnissant, l’arrêt retient encore que celle-ci justifie avoir occupé ce logement ayant constitué le domicile conjugal depuis le décès de son époux et y résider encore un an après, en avoir assuré l’entretien et y avoir employé un salarié et en déduit qu’elle a manifesté, de manière non équivoque, sa volonté de bénéficier du droit d’usage et d’habitation dans l’année qui a suivi le décès.
11. En statuant ainsi, la cour d’appel a violé les textes susvisés. »
Pour consulter la décision :
Décryptage
Par un arrêt n°20-16674 du 2 mars 2022, la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation avait déjà affirmé que le simple maintien dans les lieux ne suffit pas à justifier d’une manifestation de volonté de bénéficier du droit viager au logement de l’article 764 du Code civil.
La manifestation de volonté peut être tacite. Simplement, elle ne peut résulter d’un simple maintien dans les lieux.
La Cour de cassation n’est pas exigeante sur la matérialisation et se contente : d’une mention dans la déclaration de succession, dans un acte d’assignation, dans un acte de notoriété, …
Mais elle exige une absence totale d’équivoque. Une simple attitude matérielle ne suffit pas, et c’est bien légitime.
Voir notre article de l’époque qui semble n’avoir pas pris une ride :
Voir aussi sur ce sujet :
Par cette nouvelle décision, la Cour suprême confirme sa jurisprudence.