Un père remet à son fils une somme d’argent pour acquérir un bien immobilier. Ce dernier est-il tenu au rapport successoral ? La Cour de cassation se prononce.
La décision
Des difficultés surviennent lors du règlement de la succession de M. L, décédé en laissant pour lui succéder deux fils.
L’un des fils invoque le fait que son père aurait donné à son frère une somme d’argent ayant permis à ce dernier d’acquérir un bien immobilier et sollicite le rapport successoral.
La Cour d’appel de Douai – Douai 22 juillet 2021, n° 18/05136 – lui donne raison, retenant que le frère ne pouvant justifier de l’origine des fonds, l’acquisition n’a pu être financée que par le de cujus.
La Cour de cassation – Cass. civ. 1, 1er juin 2023, 21-22.840, Inédit – casse l’arrêt :
« Vu l’article 843, alinéa 1er, du code civil :
5. Pour dire que M. [U] [L] a bénéficié d’une libéralité de son père lors de l’acquisition de l’immeuble de [Localité 3], le 7 décembre 1979, qui doit être rapportée à la succession, la cour d’appel retient que les fonds paternels ont servi à financer en partie ce bien.
6. En statuant ainsi, sans constater l’intention libérale de [K] [L], la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. »
Pour consulter la décision :
Décryptage
Pour rappel, une donation nécessite la réunion de trois conditions cumulatives :
- Un appauvrissement du donateur,
- Un enrichissement corrélatif du donataire,
- Une intention libérale.
Constater la remise d’une somme d’argent par un père à son fils n’est pas suffisant pour qualifier cette remise de donation et par voie de conséquence la rendre rapportable.
La Cour de cassation doit une fois de plus rappeler que l’intention libérale est nécessaire et qu’elle ne se présume pas.
Dans un cas similaire, une Cour d’appel ayant considéré qu’une fille avait bénéficié d’une donation de ses parents pour l’acquisition d’un bien immobilier au motif que « celle-ci n’avait pas les capacités financières nécessaires et a été aidée par ses parents », la Cour de cassation avait rappelé qu’il lui incombait de rechercher si les parents avaient ou non agi dans une intention libérale (Cass. civ. 1, 10 février 2021, n° 19-20.026, Inédit).