SOCIETE CIVILE : QUEL EST LE STATUT DES HERITIERS D’UN ASSOCIE DECEDE ?

L’associé d’une société civile décède. Les statuts sont muets sur les conséquences. Les agissements personnels des héritiers à l’égard du locataire de la SCI relèvent-ils de la garantie d’éviction du fait des tiers ? La Cour de cassation tranche.

La décision

Un litige nait entre une SCI, propriétaire bailleur d’un local commercial et d’un stationnement, et son locataire.

Un des associés de la SCI bailleresse étant décédé, la société appelle personnellement en garantie les héritiers, ces-derniers étant accusés d’avoir cadenassé l’accès au parking.

Le locataire fait grief à l’arrêt – CA PAPEETE 27 mai 2021 – de rejeter son action contre le bailleur, alors :

  • que la société n’est pas dissoute par le décès d’un associé, mais continue avec ses héritiers ou légataires, sauf à prévoir dans les statuts qu’ils doivent être agréés par les associés. En constatant que les héritiers de l’associé décédé n’étaient pas partie au contrat de bail, la Cour d’appel n’a pas exigé des héritiers, comme elle l’aurait dû, de prouver qu’ils n’étaient pas devenus associés.
  • que le bailleur est tenu de garantir le locataire du trouble de jouissance causé par les personnes dont il doit répondre ; qu’une société de personnes doit répondre à l’égard de son locataire du conflit interne entre ses associés.

La Cour de cassation – Chambre civile 3, 9 mars 2023, 21-21.698, Publié au bulletin – lui donne raison :

« … la société n’est pas dissoute par le décès d’un associé, mais continue avec ses héritiers ou légataires, sauf à prévoir dans les statuts qu’ils doivent être agréés par les associés. Il peut, toutefois, être convenu que ce décès entraînera la dissolution de la société ou que celle-ci continuera avec les seuls associés survivants.

… le bailleur, constitué en société civile, est tenu de garantir le locataire des troubles que ses associés, qui ne sont pas des tiers à son égard au sens de l’article 1725 du code civil, ont apporté à sa jouissance par voie de fait.

… une société civile étant présumée continuer avec les héritiers d’un associé décédé, il incombe à celui qui dénie la qualité d’associé à l’héritier d’un associé d’établir l’existence d’une stipulation contraire des statuts. »

Pour consulter la décision :

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000047304634?page=1&pageSize=10&query=21-21698&searchField=ALL&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=juri&typePagination=DEFAULT

Décryptage

En l’espèce, les juges n’avaient pas vérifié si les statuts de la société civile étaient muets sur les conséquences du décès d’un associé. Dès lors, à défaut de stipulations statutaires contraires, la société n’est pas dissoute mais se poursuit avec les ayants-droits, conformément aux dispositions de l’article 1870 du Code civil.

Dans ce cas, aucun agrément n’est requis. Les héritiers n’étaient pas des tiers à l’égard de la société, leurs agissements relevaient donc de la garantie d’éviction de son fait personnel.

Cette décision est l’occasion de rappeler que les statuts peuvent déroger à ces règles en prévoyant :

  • que la société continue avec les héritiers ou légataires, mais que ces derniers doivent être agréés par les associés.
  • que le décès d’un associé entraînera la dissolution de la société ou que celle-ci continuera avec les seuls associés survivants.
  • que la société continuera soit avec le conjoint survivant, soit avec un ou plusieurs des héritiers, soit avec toute autre personne désignée par les statuts ou, si ceux-ci l’autorisent, par disposition testamentaire.
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