Une SNC qui procède à des déclarations d’IS au cours de plusieurs exercices successifs peut-elle invoquer un défaut d’option valable pour finalement relever de l’IR ? Le Conseil d’Etat se prononce.
La décision
En 2006, Monsieur A et son épouse créent la SNC « La Parfumerie des Faubourgs », laquelle souscrit des déclarations d’impôt sur les sociétés. Au bout de quelques années, l’administration notifie un redressement pour suppléments d’IS et un redressement d’IR de Monsieur et Madame A sur le fondement des revenus réputés distribués.
Les contribuables contestent, remettant notamment en cause la méthode de reconstitution de sa comptabilité retenue par l’administration. Les juges du fond leur donnent partiellement raison (TA BESANCON, 10 mars 2020, n° 1701676).
Durant la procédure suivie en appel, par une mesure d’instruction, la cour administrative d’appel de NANCY demande à l’administration fiscale les justificatifs de l’assujettissement à l’IS de la société. Puis elle indique aux parties qu’elle est susceptible de relever d’office le moyen d’ordre public de l’absence d’option régulière pour l’IS.
La Cour administrative d’appel – CAA NANCY, 9 décembre 2021, n° 20NC02437 et 20NC02438 – conclut sur ce point au défaut d’option valable pour l’IS et par conséquent à l’imposition des bénéfices de la SNC à l’IR entre les mains de ses associés.
Sur pourvoi de l’administration, le Conseil d’Etat – CE 9ème chambre, 27/01/2023, 461268, Inédit au recueil Lebon – se prononce :
« … En estimant que, par les éléments qu’elle avait produits, l’administration fiscale ne justifiait pas de l’existence d’une option valable de la société Parfumerie des Faubourgs à l’impôt sur les sociétés alors même que cette société et M. et Mme A… se bornaient à contester la valeur probante de ces éléments au regard des dispositions mentionnées au point 3 ci-dessus, sans alléguer que la société n’avait jamais exercé une telle option ni que c’était à tort qu’elle s’était acquittée de ses obligations au titre de cet impôt depuis au moins l’exercice clos en 2011 jusqu’à sa transformation en société anonyme à responsabilité limitée, la cour administrative d’appel de Nancy a dénaturé les pièces du dossier. »
Décryptage
Les sociétés de personnes relèvent par nature de l’impôt sur le revenu – art. 8 à 8 ter du CGI.
L’option pour l’IS est possible et rétroagit au 1er jour de l’exercice à condition d’être notifiée avant la fin du troisième mois de l’exercice au titre duquel l’entreprise souhaite être soumise pour la première fois à l’impôt sur les sociétés – art 239 CGI.
Pour exercer valablement son option à l’IS, la société doit :
– soit notifier son option au service des impôts du lieu du principal établissement. Cette notification doit indiquer la désignation de la société et l’adresse du siège social, les nom, prénoms et adresse de chacun des associés, membres ou participants, ainsi que la répartition du capital social ou des droits entre ces derniers. Elle est signée dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, par tous les associés, membres ou participants – art 350 F Annexe 3 du CGI.
– soit cocher la case prévue à cet effet sur le formulaire remis au centre de formalités des entreprises ou au greffe du tribunal de commerce dont elles dépendent à l’occasion de la déclaration de leur création ou de leur modification, manifestant ainsi sans ambiguïté l’exercice de son option.
En l’espèce, la société déclarait l’IS et était enregistrée comme telle informatiquement par l’administration. Toutefois, il n’était pas justifié ni d’une option par notification expresse ni d’une option sur l’imprimé M0.
Le Conseil d’Etat rappelle ces modalités pour un exercice valable de l’option à l’IS.
Toutefois, il annule l’arrêt d’appel mais pour des raisons de procédure : le juge ne pouvait pas relever d’office le moyen d’ordre public tiré de ce que la société ne pouvait être soumise à l’IS à défaut d’une option régulière, dès lors que le non-assujettissement ne ressortait pas manifestement des pièces du dossier et n’avait pas été invoqué par le redevable.
En d’autres termes, une société des articles 8 à 8ter du CGI assujettie de fait à l’IS alors qu’il n’est pas prouvé qu’elle a opté, doit être considérée comme relevant en réalité de l’IR.
Pour consulter la décision :