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Bail commercial : le droit d’entrée relève-t-il de la TVA ?

Le preneur d’un bail commercial verse au propriétaire un droit d’entrée.

Il déduit la TVA y afférente.

En avait-il le droit ?

Explications

La Société du Centre Commercial de la Défense consent un bail commercial à la SARL Land River, pour une activité de vente de vêtements :

  • Loyer : 154.000 € HT,
  • Droit d’entrée : 600.000 € HT.

Le locataire déduit la TVA payée sur le droit d’entrée. L’administration conteste la déduction et obtient gain de cause devant le TA de Cergy-Pontoise puis la CA de Versailles.

Le Conseil d’Etat, par une décision du 15 février 2019, casse et donne raison au locataire, en rappelant sa position déjà exprimée à maintes reprises :

« Le droit d’entrée dû lors de la conclusion d’un bail commercial doit, en principe, être regardé comme un supplément de loyer qui constitue, avec le loyer lui-même, la contrepartie d’une opération unique de location, et qui est soumis à la taxe sur la valeur ajoutée au même titre que celui-ci, et non comme une indemnité destinée à dédommager le bailleur d’un préjudice résultant de la dépréciation de son patrimoine. La seule circonstance que le bail commercial se traduise, pour le preneur, par la création d’un élément d’actif nouveau, compte tenu du droit au renouvellement du bail que celui-ci acquiert, ne suffit pas pour caractériser une telle dépréciation. »

L’inscription à son bilan au poste fonds de commerce du montant payé de 600.000 € ne suffit pas à justifier que le droit d’entrée n’était pas un supplément de loyer.

De cette qualification résultent une déductibilité de la TVA côté preneur, mais également une taxation correspondante côté bailleur.

La décision du Conseil d’Etat n’est pas un arrêt d’espèce. Il s’agit d’une décision de deux chambres réunies, mentionnée au recueil Lebon.

C’est dire si la Cour suprême entend que le message passe bien : un droit d’entrée est un supplément de loyer, à moins que les circonstances de l’espèce ne permettent de justifier qu’il est la contrepartie d’une cession d’actif, ce qui ne peut résulter de la simple acquisition de la « propriété commerciale ».

Dès lors que le droit d’entrée est qualifié de supplément de loyer, il constitue avec le loyer la contrepartie d’une opération unique de location et il est soumis à la TVA au même titre que le loyer.

Cette position est conforme aux principes généraux de la TVA et à l’interprétation qu’en donne la jurisprudence de la CJUE.

Critique

Les faits analysés ici sont « on ne peut plus simples », et pourtant, il aura fallu trois degrés de juridictions contentieuses et 11 ans pour aboutir.

Que dire alors des cas plus complexes !

Dans une décision du 17 juin  1985, le Conseil d’Etat affirmait déjà que le droit au renouvellement du bail commercial ne suffisait pas à caractériser l’existence d’une cession d’actif par le bailleur, d’autant plus que ce dernier poursuivait son exploitation de marchand de meubles dans un autre local et que le bail portait sur une activité de restauration.

A l’inverse, dans une autre décision du 28 septembre 1984, le Conseil d’Etat a considéré que « le droit d’entrée qu’un bailleur perçoit d’un preneur de local commercial ne constitue pas un supplément de loyer dès lors :

  1. a) que le loyer stipulé est normal,
  2. b) que la location entraîne pour le bailleur une dépréciation de son fonds de commerce d’hôtellerie, le bail lui interdisant de poursuivre une activité de restauration. »

Preneur et bailleur doivent donc « qualifier » le droit d’entrée convenu entre eux, sans que leur choix ne soit opposable à l’administration, ni le cas échéant au juge.

Ce qui est regrettable, c’est l’incertitude et le délai de règlement.

Encore une fois, les créateurs de richesse que sont les entrepreneurs doivent slalomer entre les contraintes administratives. Nombreux sont ceux qui préfèreraient payer plus cher mais se voir appliquer des règles simples et claires.

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