Un redevable justifie d’une durée d’occupation de 11 jours pour invoquer le bénéfice de l’exonération pour cession de sa résidence principale ! La Cour d’appel de Paris se prononce.
La décision
En 2017, Mme B vend un bien immobilier constitué de divers lots de copropriété. Concernant la plus-value immobilière, elle déclare qu’une partie des lots est exonérée comme constituant sa résidence principale. Elle s’acquitte d’une somme de 72.768 € au titre de partie d’un des lots constituant un studio indépendant, loué à un tiers, lequel a quitté les lieux 11 jours avant la vente.
En 2019, elle dépose une réclamation pour obtenir la décharge de son imposition, estimant que cette partie de lot était rattachable à sa résidence principale.
Cette réclamation est rejetée par l’administration fiscale, par le Tribunal administratif de Paris et par la Cour d’appel – CA Paris 20 octobre 2023, 22PA00938 :
« 4. Pour solliciter le bénéfice de l’exonération prévue au 1° du II de l’article 150 U du code général des impôts, M. et Mme B…, qui en application des dispositions de l’article R* 194-1 du livre des procédures fiscales supportent la charge de démontrer l’exagération de l’imposition à laquelle ils ont été soumis d’après les bases indiquées dans leur déclaration, soutiennent que ce studio doit être considéré comme affecté à leur résidence principale. Toutefois, la seule circonstance que l’occupation locative du studio a cessé onze jours avant la cession intervenue le 28 juillet 2017 ne suffit pas, compte tenu de la particulière brièveté de ce délai, pour permettre de le rattacher à la résidence principale des époux B…. De la même manière, la seule circonstance, dont les époux B… ne rapportent au demeurant pas la preuve, que le studio ait été utilisé par ses propriétaires ou l’un de leur enfant rattaché au foyer fiscal pendant cette période de onze jours ne permet pas davantage de regarder le studio comme constituant une partie de la résidence principale du foyer compte tenu de la brièveté de cette occupation. Par ailleurs, la circonstance invoquée par les requérants que les autres lots de cet ensemble immobilier étaient en 2017 affectés à la résidence principale de la famille B… ne suffit pas à conférer à la partie du lot n° 248 en cause la qualification de résidence principale de la famille, compte tenu de l’aménagement reçu par ce studio depuis plus d’un an, de sa configuration et de son indépendance fonctionnelle des autres lots. Par suite, les époux B… ne sont pas fondés à soutenir que le lot en cause constituait une partie de leur résidence principale au sens des dispositions de l’article 150 U du code général des impôts. »
Pour consulter la décision :
Décryptage
Aux termes de l’article 150 U du CGI, les plus-values réalisées lors de la cession de la résidence principale du cédant au jour de la cession sont exonérées. Cette exonération s’applique également aux dépendances immédiates et nécessaires cédées simultanément avec cet immeuble.
Pour que l’exonération s’applique, deux conditions cumulatives sont exigées :
- Il doit s’agir de la résidence principale du cédant,
- Il doit s’agir de sa résidence principale au jour de la cession.
Sont considérés comme résidences principales, les immeubles ou parties d’immeubles constituant la résidence habituelle et effective du propriétaire.
L’administration estime qu’une utilisation temporaire d’un logement ne peut être regardée comme suffisante pour que le logement ait le caractère d’une résidence principale susceptible de bénéficier de l’exonération. Lorsqu’un doute subsiste, le contribuable est tenu de prouver par tous moyens l’effectivité de la résidence.
Le logement doit être la résidence principale du cédant au jour de la cession.
L’administration considère que cette condition exclut de l’exonération les cessions portant sur des immeubles qui, bien qu’ayant été antérieurement la résidence principale du propriétaire, n’ont plus cette qualité au moment de la vente. Par suite, l’exonération ne s’applique pas aux cessions portant sur des immeubles qui, au jour de la cession, sont donnés en location, sont occupés gratuitement par des membres de la famille du propriétaire ou des tiers, sont devenus vacants ou sont à la disposition du titulaire d’un logement de fonction.
Les faits de l’espèce étaient caricaturaux : le studio en question était matériellement indépendant des autres lots constituant la résidence principale du cédant, il avait été loué à un tiers pendant 10 mois avant la cession, la libération des lieux et donc l’occupation potentielle par le propriétaire n’avait eu lieu que 11 jours avant la cession.
Certes au jour de la cession, le studio n’était plus loué à un tiers. Mais, même si antérieurement le bien était effectivement utilisé à titre de résidence principale, la location à un tiers fait perdre la qualité de résidence principale. Il faut une nouvelle utilisation personnelle, d’une durée suffisante pour que le bien soit de nouveau considéré comme affecté à la résidence principale.
La résidence habituelle doit s’entendre du lieu où le contribuable réside habituellement pendant la majeure partie de l’année.
Il s’agit d’une question de fait qu’il appartient à l’administration d’apprécier sous le contrôle du juge de l’impôt. Dans le cas où le contribuable réside six mois de l’année dans un endroit et six mois dans un autre, la résidence principale est celle pour laquelle l’intéressé bénéficie des abattements en matière de taxe d’habitation.