A cette question, la doctrine majoritaire trouvait fort cohérent jusqu’à présent, de répondre par l’affirmative. Un entrepreneur qui n’exerce plus n’a plus besoin de protection contre des créanciers professionnels. Mais ça, c’étant avant l’intervention récente de la Cour de cassation.
Créée en 2003 afin de permettre à un entrepreneur individuel de protéger sa résidence principale de ses créanciers professionnels sans nécessairement créer une société, la déclaration d’insaisissabilité est aujourd’hui bien connue.
La Loi de modernisation de l’économie de 2008 a étendu la protection à tous les biens fonciers bâtis et non bâtis de l’entrepreneur individuel non affectés à l’usage professionnel.
Puis la Loi MACRON de 2015 a instauré l’insaisissabilité de Droit de la résidence principale de l’entrepreneur individuel inscrit à un registre de publicité légale par ses créanciers professionnels.
Toutes les déclarations d’insaisissabilité antérieures au 8 août 2015 demeurent valables. Pour toutes celles postérieures, le champ d’application de ces déclarations est limité à tous les biens immobiliers appartenant à l’entrepreneur individuel sans être affectés ni à son activité professionnelle ni à sa résidence principale.
Le dispositif n’a jamais instauré de limitation de temps à l’effet de l’insaisissabilité.
A moins de stipuler expressément une durée, ce qui semble possible bien que ce ne soit ni expressément prévu ni surtout compréhensible, la déclaration cessera de produire ses effets dans les cas suivants :
- la cession des droits immobiliers concernés, lorsqu’il n’y a pas remploi conforme au texte ;
- la renonciation par l’entrepreneur à la déclaration ;
- le partage si les biens ne sont pas attribués à l’entrepreneur ;
- le décès du déclarant ;
- La cessation d’activité, selon la doctrine majoritaire qui semblait jusqu’ici fort logique ;
- La mise en société ;
- L’abandon de la résidence principale.
En l’espèce, le liquidateur d’une entreprise individuelle invoquait la radiation de l’entrepreneur du Répertoire Des Métiers et donc la cessation de son activité, pour voir la déclaration d’insaisissabilité qu’il avait réalisée en 2013, inopposable à la liquidation judiciaire.
La Cour de cassation, dans une décision n° 785 FS-P+B du 17 novembre 2021, rejette les prétentions du liquidateur au motif que :
« …les effets de cette déclaration subsistent aussi longtemps que les droits des créanciers auxquels elle est opposable ne sont pas éteints, sauf renonciation du déclarant lui-même, de sorte que la cessation de son activité professionnelle ne met pas fin, par elle-même, aux effets de la déclaration. »
Pour consulter la décision : https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000044352197?page=1&pageSize=10&query=20-20821&searchField=ALL&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=juri&typePagination=DEFAULT
Est-ce une décision d’opportunité ou un véritable arrêt de principe ?
La publication au bulletin nous laisse à penser que la Cour suprême entend bien ici ériger son intervention en principe.