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LMP ET EXONERATION D’IMPOT SUR LA FORTUNE : RECETTES BRUTES OU RECETTES NETTES ?

Pour bénéficier de l’exonération d’impôt sur la fortune au titre des biens professionnels, faut-il tenir compte des recettes brutes ou des recettes nettes de la location meublée professionnelle ? La Cour de cassation se prononce.

La décision

L’administration fiscale notifie une proposition de rectification au titre de l’ISF, portant intégration dans l’assiette imposable des immeubles d’habitation loués meublés, au motif que ces immeubles ne constituaient pas des biens professionnels exonérés, en ce que les contribuables avaient retiré de leur activité de location un bénéfice imposable nul ou un déficit qui ne pouvait représenter plus de 50 % des revenus professionnels de leur foyer fiscal.

Les contribuables contestent, considérant que la condition de prépondérance des revenus tirés de l’activité de location de meublés par rapport aux autres revenus du foyer fiscal doit s’apprécier au regard des recettes brutes et non des recettes nettes.

La Cour d’appel de Besançon (12 avril 2022 n° 20/01646) donne raison à l’administration :

« Or, il résulte des déclarations fiscales effectuées par les époux F. que les locations meublées n’ont donné lieu à aucun revenu déclaré au titre des années 2015 et 2017 et à un déficit déclaré à hauteur de 170 216 euros au titre de l’année 2016.

Dès lors, le seuil de 50 % conditionnant l’exclusion, au titre de l’appréciation de l’assiette de l’ISF, des locaux d’habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés, n’est pas caractérisé et le jugement critiqué sera infirmé sur ce point. »

Les contribuables forment un pourvoir, invoquant :

  • Les réponses ministérielles de 2006 et 2007 ayant précisé qu’il y a lieu de retenir les recettes nettes : n’ayant pas été reprises au BOFIP, elles sont caduques,
  • Le fait que cette méthodologie, conforme à ces réponses ministérielles, ait été reprise pour l’IFI, ne pouvait régir l’ISF,
  • Que, pour apprécier la condition de seuil de 50 % des revenus, il convient de retenir les recettes brutes tirées de l’activité de location meublée, et non le résultat net dégagé par cette activité après déduction des charges.

La Cour de cassation – Cass. Com., 20 décembre 2023, 22-17.612, Publié au bulletin – rejette le pourvoi :

« 6. L’arrêt retient que, s’il résulte de l’article 885 R du code général des impôts que l’ensemble des recettes tirées de la location de meublés par M. et Mme [J], soit 147 063 euros au titre de l’année 2015, 144 092 euros au titre de l’année 2016 et 127 652 euros au titre de l’année 2017, doivent être prises en compte pour apprécier le seuil légal de 23 000 euros, la notion de revenus doit être distinguée de celle de recettes en ce qu’elle correspond aux sommes effectivement perçues par les contribuables, lesquels ne peuvent valablement invoquer des revenus équivalents au chiffre d’affaires des locations de meublés, puis relève qu’il résulte des déclarations fiscales de M. et Mme [J] que leur activité de location meublée professionnelle n’a donné lieu à aucun revenu au titre des années 2015 et 2017 et à un déficit de 170 216 euros au titre de l’année 2016.

7. De ces énonciations, constatations et appréciations, abstraction faite des motifs erronés mais surabondants critiqués par la première branche comme de ceux également surabondants critiqués par la deuxième branche, la cour d’appel a déduit à bon droit que le seuil de 50 % des revenus, conditionnant l’exclusion de l’assiette de l’ISF des locaux d’habitation loués meublés par M et Mme [J], n’était pas atteint. »

Pour consulter la décision :

https://www.legifrance.gouv.fr/juri/id/JURITEXT000048768940?init=true&page=1&query=22-17.612&searchField=ALL&tab_selection=all

Décryptage

En matière d’ISF, il résultait de l’article 885 R du CGI que :

« Sont considérés comme des biens professionnels au titre de l’impôt de solidarité sur la fortune les locaux d’habitation loués meublés ou destinés à être loués meublés par des personnes louant directement ou indirectement ces locaux, qui, inscrites au registre du commerce et des sociétés en qualité de loueurs professionnels, réalisent plus de 23 000 € de recettes annuelles et retirent de cette activité plus de 50 % des revenus à raison desquels le foyer fiscal auquel elles appartiennent est soumis à l’impôt sur le revenu dans les catégories des traitements et salaires, bénéfices industriels et commerciaux, bénéfices agricoles, bénéfices non commerciaux, revenus des gérants et associés mentionnés à l’article 62. »

Pour bénéficier de l’exonération ISF au titre des biens professionnels, le loueur en meublée professionnel devait donc remplir 3 conditions cumulatives :

  • être inscrit au RCS en qualité de loueur professionnel,
  • réaliser plus de 23.000 € de recettes annuelles,
  • retirer de cette activité plus de 50% de ses revenus « professionnels ».

S’agissant de la 2ème condition relative au montant des recettes annuelles, il y a lieu de retenir « le montant réel des sommes perçues en vertu des contrats de location à titre de loyer, charges, taxes et remboursement de frais » (Cass. com., 16 janvier 1990, 88-15.607, Publié au bulletin) donc les recettes « brutes ».

Quid s’agissant de la 3ème condition relative à la prépondérance des revenus de la LMP par rapport aux autres revenus « professionnels » ?

Deux réponses ministérielles (RM n° 114639 JOAN du 06/03/2007 et RM n° 22527 JO Sénat du 03/08/2006) avaient précisé qu’il y a lieu de retenir le bénéfice industriel et commercial net annuel dégagé par l’activité de location meublée.

Ces réponses n’ayant pas été reprise au BOFIP, le contribuable souhaitait qu’elles n’étaient plus applicables.

La Cour de cassation énonce qu’« il convient de retenir, non les recettes brutes tirées de l’activité de location meublée professionnelle, mais le bénéfice industriel et commercial net annuel dégagé par cette activité, afin de permettre la comparaison avec l’ensemble des revenus professionnels du foyer fiscal, y compris le bénéfice tiré de la location. »

En matière d’IFI, le BOFIP précise expressément que : « Pour la détermination du seuil de 50 %, Il convient de retenir le bénéfice commercial net annuel dégagé par l’activité de location meublée. » BOI-PAT-IFI-30-10-10-10 n° 60

En pratique, après déduction des charges et amortissements, il est peu fréquent qu’une personne exerçant en parallèle une activité professionnelle puisse bénéficier, pour ses biens loués en meublé, de l’exonération au titre des biens professionnels, surtout les premières années.

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