Le médiateur de l’AMF précise que les établissements teneurs de comptes peuvent, en amont, rejeter l’ordre d’un client lorsque la limite fixée par ce dernier est trop éloignée du dernier cours connu. Toutefois, afin d’éviter des incompréhensions, voire des contestations, le client doit en être informé.
Les faits
En septembre 2021, M. H détenait des actions V, valeur biotech très volatile.
Anticipant une baisse significative du cours de la valeur V sur la journée, en comparant le cours théorique d’ouverture bien inférieur au dernier cours connu, et précisant qu’il souhaitait limiter ses pertes, M. H a tenté de saisir en ligne un ordre de vente à cours limité de 10 €, qui a cependant été rejeté par l’établissement.
Après plusieurs tentatives vaines et à défaut de pouvoir passer un ordre à cours limité de 10 €, sans cesse bloqué par la plateforme de bourse en ligne, M. H a fini par saisir un ordre à seuil de déclenchement à 16 €, qui, lui, a bien été pris en compte et exécuté le jour même, au cours de 11,02 €.
Le cours de ses actions n’étant finalement jamais descendu au-dessous de 10 €, M. H a estimé que si son ordre initial, au cours limité de 10 €, avait correctement été pris en compte dès l’origine, ses actions n’auraient jamais été vendues.
Croyant être victime d’un dysfonctionnement de la plateforme de bourse de son teneur de compte, M. H a saisi le médiateur de l’AMF pour obtenir la réparation de son préjudice à hauteur de la différence entre le cours le plus haut de la journée et le cours auquel son ordre a été exécuté.
Au cours de l’instruction du dossier, l’établissement a précisé que le blocage résultait d’un mécanisme interne, ayant pour objectif de rejeter les ordres dits « aberrants » – c’est-à-dire trop éloignés du dernier cours connu –, notamment en phase de préouverture, et ce à la suite de préjudices rencontrés par des clients qui commettaient des erreurs importantes de saisie. En l’espèce, il a été précisé que l’ordre passé par Monsieur H avait été considéré comme aberrant puisqu’il était 50 % inférieur au dernier cours connu.
L’établissement a accepté d’indemniser M. H d’un montant de 1.582,58 € correspondant à la différence entre le prix de vente réalisé et le prix de vente qu’il aurait constaté si son ordre avait été passé comme il le souhaitait.
Les leçons à en tirer selon le médiateur
« Dans ce dossier, il y a deux leçons à tirer :
Pour les épargnants :
Il m’apparait dans un premier temps que les épargnants doivent être particulièrement attentifs au type d’ordre choisi (ordre au marché, ordre à cours limité et ordre à seuil ou plage de déclenchement). Il est en effet fondamental que les investisseurs s’assurent régulièrement qu’ils ont une correcte compréhension des spécificités des ordres qu’ils choisissent et notamment en présence d’ordres prioritaires et sans maitrise du prix. (Voir Journal de bord du Médiateur – avril 2022)
Concernant l’ordre à cours limité, il permet d’acheter à un prix maximal ou de vendre à un prix minimal, à la condition, bien sûr, que la limite de prix soit atteinte.
Je rappelle parallèlement, que l’ordre à seuil de déclenchement permet d’abord, et avant tout, de se protéger contre un éventuel retournement de marché, en limitant les pertes ou en s’assurant d’un gain minimal, mais il ne permet pas d’en maîtriser le prix.
Pour les professionnels :
Au regard de l’incompréhension décrite dans le cas d’espèce, il serait souhaitable, à mon sens, que les établissements communiquent davantage sur leur politique visant à bloquer les ordres trop éloignés du dernier cours connu.
Par exemple, lorsqu’un ordre dit « aberrant » est rejeté, une fenêtre pop-up pourrait utilement s’afficher expliquant plus complètement cette politique.«
Pour consulter le communiqué :