PLUS-VALUES IMMOBILIERES : LA MISE EN VENTE A UN PRIX EXCESSIF PEUT FAIRE PERDRE L’EXONERATION « RESIDENCE PRINCIPALE »

Une personne met en vente sa résidence principale à un prix excessif, et met plus de 4 ans à ajuster son prix pour parvenir finalement à la vente. Bénéficie-t-elle de l’exonération, dès lors qu’elle est devenue non-résidente entre temps ? Réponse par la CAA de VERSAILLES.

La décision

En 2009, Madame A met en vente sa résidence principale constituée d’un hôtel particulier.

En 2013, elle le quitte pour partir vivre en Allemagne.

La vente est signée en octobre 2017.

L’administration, puis le tribunal administratif – TA VERSAILLES n°1907263 du 28 septembre 2021 – lui refusent l’exonération d’impôt sur la plus-value au titre de la cession de la résidence principale.

Madame A interjette appel au motif qu’un immeuble ne perd pas sa qualité de résidence principale du cédant au jour de la cession du seul fait que celui-ci a libéré les lieux avant ce jour, à condition que le délai pendant lequel l’immeuble est demeuré inoccupé puisse être regardé comme normal. Il en va ainsi lorsque le cédant a accompli les diligences nécessaires, compte tenu des motifs de la cession, des caractéristiques de l’immeuble et du contexte économique et réglementaire local, pour mener à bien cette vente dans les meilleurs délais à compter de la date prévisible du transfert de sa résidence habituelle dans un autre lieu.

La Cour administrative d’appel – VERSAILLES, 1ère chambre, 08/03/2023, 21VE03104, Inédit au recueil Lebon – la déboute aux motifs notamment :

  • Qu’elle ne démontrait pas que le marché immobilier local connaissait des difficultés particulières,
  • Et qu’elle avait maintenu un prix excessif pendant plusieurs années (17,9% de plus que le prix de la cession).

« Au vu de ces éléments, le délai de plus de quatre ans et demi qui s’est écoulé entre le déménagement de Mme A… en Allemagne et la date de mise en vente du bien apparaît comme anormalement long. Dès lors, la requérante, à qui incombe la charge de la preuve, n’a pas établi que la plus-value réalisée devait bénéficier de l’exonération prévue par le 1° du II de l’article 150 U du code général des impôts. »

Pour consulter la décision :

https://www.legifrance.gouv.fr/ceta/id/CETATEXT000047318107?juridiction=CONSEIL_ETAT&juridiction=COURS_APPEL&juridiction=TRIBUNAL_ADMINISTATIF&juridiction=TRIBUNAL_CONFLIT&page=1&pageSize=10&query=VERSAILLES+21VE03104&searchField=ALL&searchType=ALL&sortValue=DATE_DESC&tab_selection=cetat

Décryptage

Lors de la mise en vente, le logement constituait encore la résidence principale du cédant. C’est donc l’exonération classique qui était invoquée, laquelle nécessite d’intervenir dans un délai normal.

BOI-RFPI-PVI-10-40-10 n°190 :

« Il est admis, lorsque l’immeuble a été occupé par le cédant jusqu’à sa mise en vente, que l’exonération reste acquise si la cession intervient dans des délais normaux et sous réserve que le logement n’ait pas, pendant cette période, été donné en location ou occupé gratuitement par des membres de la famille du propriétaire ou des tiers.

Aucun délai maximum pour la réalisation de la cession ne peut être fixé a priori. Il convient donc sur ce point de faire une appréciation circonstanciée de chaque situation, y compris au vu des raisons conjoncturelles qui peuvent retarder la vente, pour déterminer si le délai de vente peut ou non être considéré comme normal.

Dans un contexte économique normal, un délai d’une année constitue en principe le délai maximal. Cependant, l’appréciation du délai normal de vente est une question de fait qui s’apprécie au regard de l’ensemble des circonstances de l’opération, notamment des conditions locales du marché immobilier, du prix demandé, des caractéristiques particulières du bien cédé et des diligences effectuées par le contribuable pour la mise en vente de ce bien (annonces dans la presse, démarches auprès d’agences immobilières, etc.).

En tout état de cause, lorsque le délai excède la durée normale de vente, le seul fait que l’immeuble ait été mis en vente n’est pas considéré comme de nature à justifier l’exonération de la plus-value, notamment s’il apparaît que le prix demandé ne correspond pas aux prix pratiqués sur le marché immobilier local. »

Cette décision illustre bien les conséquences d’une obstination du vendeur à maintenir un prix excessif par rapport au marché.

Pour se sortir de cette situation, le contribuable invoquait le 2° du II de l’article 150 U du CGI, qui permet aux non-résidents ressortissants européens, de bénéficier d’une exonération dans la limite d’une résidence par contribuable et de 150 000 € de plus-value nette imposable, à la double condition que :

– le cédant ait été fiscalement domicilié en France de manière continue pendant au moins deux ans à un moment quelconque antérieurement à la cession ;

– la cession intervienne au plus tard le 31 décembre de la cinquième année suivant celle du transfert par le cédant de son domicile fiscal hors de France ou, sans condition de délai, lorsque le cédant a la libre disposition du bien au moins depuis le 1er janvier de l’année précédant celle de la cession.

Ces dispositions s’appliquent aux plus-values réalisées au titre des cessions intervenues depuis le 1er janvier 2014.

L’article 43 de la loi n°2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019 a porté à dix ans le délai de cession à compter du transfert du domicile fiscal hors de France pour pouvoir bénéficier de l’exonération du 2° du II de l’article 150 U du CGI, et ce, pour les cessions réalisées à compter du 1er janvier 2019. Pour les cessions réalisées jusqu’au 31 décembre 2018, ce délai de cession était de cinq ans.

La Cour d’appel refuse l’argument dans la mesure où l’exonération invoquée initialement était celle du 1°.

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