Une décision excédant le pouvoir des gérants et non visée par les statuts nécessite un vote unanime des associés. De qui parle-t-on ? Des associés présents ou représentés ou de tous les associés de la société ? Quelle est la sanction éventuelle ? La Cour de cassation tranche.
Quelle unanimité ?
L’assemblée générale d’une SCI adopte des résolutions portant sur l’approbation des comptes de plusieurs exercices, le quitus donné aux cogérants, l’affectation des résultats, … à l’unanimité des associés présents ou représentés.
L’un des associés assigne la société en annulation de cette assemblée, au motif que, les décisions prises excédant le pouvoir des gérants et les statuts ne prévoyant pas de stipulations particulières, les décisions auraient dû être prises à l’unanimité des associés, et non pas seulement à l’unanimité des associés présents ou représentés à l’AG, ainsi qu’il résulte de l’article 1852 du Code civil :
« Les décisions qui excèdent les pouvoirs reconnus aux gérants sont prises selon les dispositions statutaires ou, en l’absence de telles dispositions, à l’unanimité des associés. »
La Cour d’appel de Basse-Terre, par une décision du 27 janvier 2020, lui donne raison.
La SCI forme un pourvoi au motif que l’unanimité des associés visés à l’article 1852 du Code civil s’entend des associés présents ou représentés lors de l’AG, et non pas de l’ensemble des associés de la société.
La 3ème Chambre civile de la Cour de cassation, par une décision n°20-17428 du 5 janvier 2022, confirme sans ambiguïté :
« Ce texte ne restreint pas l’unanimité à celle des associés présents ou représentés à une assemblée générale, mais vise la totalité des associés de la société. »
Quelle sanction ?
La deuxième question intéressante en l’espèce est celle de la sanction.
La SCI invoque l’article 1844-10 al 3 du Code civil :
« … La nullité des actes ou délibérations des organes de la société ne peut résulter que de la violation d’une disposition impérative du présent titre, à l’exception du dernier alinéa de l’article 1833, ou de l’une des causes de nullité des contrats en général. ».
Elle considère que, même si la décision ne réunissait pas l’unanimité requise, la sanction ne peut être la nullité, les dispositions de l’article 1852 du Code civil n’étant pas impératives.
Sur cette question également, la Cour de cassation répond sans la moindre ambiguïté :
« Le principe d’unanimité, posé par l’article 1852 du code civil, à défaut de dispositions statutaires, pour prendre des décisions collectives qui excèdent les pouvoirs reconnus aux gérants, relève des dispositions impératives au sens de l’article 1844-10 précité.
La violation de ce principe ou des règles statutaires qui l’aménagent est sanctionnée par la nullité. »
Il semble bien que la Cour de cassation entende ériger cette décision en principe, compte tenu de ses formulations particulièrement claires d’une part, et de la publication de l’arrêt au bulletin d’autre part.
Quid si les statuts prévoient qu’en cas de démembrement, le droit de vote appartient à l’usufruitier, tout en ne prévoyant pas de règle concernant la majorité requise laissant place à l’application du principe de l’unanimité de l’article 1852 du Code civil ? Le nu-propriétaire ayant la qualité d’associé doit-il alors prendre part au vote ? Attention à la rédaction des statuts.
Pour consulter la décision :