Le juge du fond estime que le profit subsistant est égal à la valeur de la construction édifiée, dès lors qu’elle est financée à 100% par la communauté. La Cour de cassation se montre intransigeante : la méthodologie doit être strictement respectée.
La décision
Deux époux communs en biens construisent leur résidence principale sur un terrain propre à Monsieur. Puis, dans le cadre de leur divorce, Madame est condamnée à payer une indemnité d’occupation, et Monsieur est condamné à payer une récompense à la communauté.
Monsieur forme un pourvoi incident au motif que la Cour d’appel – CA Basse-Terre 23 novembre 2020 – a fixé le montant de la récompense à sa charge à 208.000 €, ce qui correspond à la valeur de la maison, hors terrain, alors qu’elle devrait être égale, non pas à la valeur du bien construit, mais à la plus-value procurée par la construction au fonds sur lequel elle est implantée.
La Cour de cassation – Chambre civile 1, 30 novembre 2022, 21-13.662, Inédit – lui donne raison :
« Vu l’article 1469 du code civil :
Il résulte de ce texte, d’une part, que la récompense est égale au profit subsistant quand la valeur empruntée à la communauté a servi à améliorer un bien propre à un époux qui se retrouve, au jour de la liquidation de la communauté, dans le patrimoine de ce dernier, d’autre part, que le profit subsistant, qui représente l’avantage réellement procuré au fonds emprunteur, se détermine d’après la proportion dans laquelle les fonds empruntés à la communauté ont contribué au financement de l’amélioration de ce bien propre.
Pour évaluer à 208 000 euros la récompense due par M. [P] à la communauté en raison de la construction sur un terrain propre à celui-ci d’une maison au moyen de fonds communs, l’arrêt retient que l’expertise judiciaire a permis d’évaluer à cette somme la valeur vénale de la construction seule, hors terrain, et qu’il n’y a pas lieu d’évaluer le montant de la récompense en déduisant la valeur du terrain de la valeur vénale de l’ensemble immobilier, la cour d’appel ayant pris soin de demander une évaluation distincte de la construction seule et de l’ensemble.
En statuant ainsi, alors que, pour déterminer l’avantage réellement procuré au patrimoine de l’époux, il convenait, d’abord, de chiffrer la plus-value procurée à l’immeuble par les travaux d’amélioration en déduisant de la valeur de ce bien au jour de la liquidation celle qu’il aurait eue à la même date sans les travaux réalisés, ensuite, de déterminer le profit subsistant d’après la proportion dans laquelle les fonds empruntés à la communauté avaient contribué aux travaux d’amélioration, la cour d’appel a violé le texte susvisé. »
Décryptage
Le juge du fond avait tenté un raccourci en considérant que le profit subsistant est égal à la valeur de la construction.
La Cour suprême censure ce raisonnement et rappelle la méthodologie à appliquer :
- Estimer la plus-value apportée au bien propre par les travaux réalisés,
- Puis estimer la proportion financée par la communauté.
Elle rappelle que la plus-value procurée par les travaux d’amélioration se calcule en déduisant de la valeur de ce bien au jour de la liquidation celle qu’il aurait eue à la même date sans les travaux réalisés.
La Cour d’appel avait pris soin de demander une évaluation distincte de la construction seule et de l’ensemble. Mais ce qu’elle aurait dû demander, c’est une évaluation distincte du terrain nu et de l’ensemble immobilier construit.
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