Un associé, engagé dans une procédure de retrait, peut-il finalement céder ses parts à un tiers ? La Cour de cassation se prononce.
Décision
M. T est associé d’une SCI. Il demande son retrait, ce qui est autorisé par AG de 2010. Suite à un désaccord sur l’évaluation de ses parts, un expert est désigné et évalue ses droits en août 2014.
En septembre 2014, M. T notifie à la SCI une demande d’agrément pour céder ses parts sociales à un tiers, la société H. La SCI lui notifie son refus.
En octobre 2014, M. T met en demeure la SCI de lui payer la somme évaluée par l’expert.
En avril 2015, soit plus de 6 mois après sa demande d’agrément refusée et n’ayant toujours pas reçu le remboursement de la valeur de ses droits sociaux au titre de la procédure de retrait engagée, il cède ses parts sociales à la société H.
La Cour d’appel – PARIS 5 avril 2022, n° 19/07621 – annule la cession de parts.
M. T forme un pourvoi invoquant le respect de la procédure de cession de parts de société civile, aucune offre ne lui ayant été faite dans un délai de 6 mois à compter des notifications, l’agrément à la cession projetée était réputé acquis.
La Cour de cassation – Cass. civ.3, 25 mai 2023, n° 22-17.246, Publié au bulletin – rejette le pourvoi :
« 8. La cour d’appel a retenu que M. [C] [T] s’était engagé dans une procédure de retrait avec rachat de ses parts, acceptée par la SCI, dont l’échec n’avait pas été constaté et qu’il lui incombait de mener à son terme.
9. Elle en a déduit, à bon droit, que la procédure de cession desdites parts à un tiers, initiée par M. [C] [T] en méconnaissance de la procédure de retrait en cours acceptée par la SCI, devait être annulée. »
Pour consulter la décision :
Décryptage
Il résulte de l’article 1869 du Code civil que :
« Sans préjudice des droits des tiers, un associé peut se retirer totalement ou partiellement de la société, dans les conditions prévues par les statuts ou, à défaut, après autorisation donnée par une décision unanime des autres associés. Ce retrait peut également être autorisé pour justes motifs par une décision de justice.
A moins qu’il ne soit fait application de l’article 1844-9 (3ème alinéa), l’associé qui se retire a droit au remboursement de la valeur de ses droits sociaux, fixée, à défaut d’accord amiable, conformément à l’article 1843-4. »
En l’espèce, le retrait de l’associé avait été autorisé en 2010. Il aura fallu 4 ans pour que la valeur de ses parts soit finalement fixée par un expert. 8 mois plus tard, la société ne lui a toujours pas remboursé ses droits, malgré sa mise en demeure.
Un associé qui est engagé dans une procédure de retrait peut-il y renoncer pour finalement céder ses parts à un tiers (sous réserve du respect de la procédure d’agrément) ?
La Cour de cassation estime que non : une procédure de retrait étant engagée, elle devait être menée à son terme, sauf à constater son échec.
En pratique, l’associé retrayant confronté à une société récalcitrante doit donc saisir la justice. Il ne peut pas sortir de la procédure de retrait en cédant ses parts à un tiers.