Monsieur finance la part de Madame au titre de l’acquisition de leur logement, au moyen d’un apport personnel en capital. Peut-il faire valoir sa créance à l’occasion de leur divorce ? La Cour de cassation confirme sa jurisprudence.
La décision
Deux époux mariés en séparation de biens divorcent.
Des difficultés naissent lors des opérations de comptes, liquidation et partage de leurs intérêts patrimoniaux.
Monsieur fait grief à l’arrêt de la Cour d’appel de CHAMBERY du 1er septembre 2020, de rejeter sa demande de créance au titre du financement de leur appartement, en considérant qu’il n’avait fait que remplir son obligation de contribution aux charges du mariage.
Par un arrêt n°20-21277 du 9 juin 2022, la 1ère Chambre civile de la Cour de cassation lui donne raison :
Il résulte de l’article 214 du Code civil que, sauf convention contraire des époux, l’apport en capital de fonds personnels, effectué par un époux séparé de biens pour financer la part de l’autre lors de l’acquisition d’un bien indivis affecté à l’usage familial, ne participe pas de l’exécution de son obligation de contribuer aux charges du mariage.
«Pour rejeter la demande de créance de Monsieur … au titre de l’acquisition de l’appartement …, après avoir constaté que l’immeuble avait été financé pour partie au moyen d’un apport en capital provenant d’un compte courant d’associé de celui-ci, l’arrêt relève que le contrat de mariage des époux stipule que chacun sera réputé avoir fourni au jour le jour sa part contributive, en sorte qu’ils ne seront assujettis à aucun compte entre eux, que l’importante disparité de revenus entre eux devait conduire Monsieur … à contribuer de façon plus importante aux charges du mariage, que Madame … alimentait aussi le compte commun par le versement de ses allocations chômage et familiales, que l’immeuble avait constitué le domicile conjugal et qu’ainsi les paiements effectués par Monsieur … participaient de son obligation de contribuer aux charges du mariage, sans dépasser une contribution normale. »
En statuant ainsi, la cour d’appel a violé le texte susvisé. Le même verdict est également appliqué au financement par Monsieur seul, de travaux de rénovation et construction sur une maison indivise à usage familial.
Décryptage
La Cour de cassation confirme sa jurisprudence et entend bien faire passer le message en publiant sa décision au bulletin :
Le financement de la part d’un époux séparé de biens, par son conjoint, au moyen d’un apport en capital de fonds personnels, ne peut être qualifié de participation aux charges du mariage. Seule une convention contraire pourrait en stipuler autrement.
N’est pas suffisante à ce titre, une clause du contrat de mariage dispensant d’établir des comptes et instituant une présomption de contribution de chacun.
Ca n’est que lorsque le financement consiste en une prise en charge du remboursement d’emprunts que la Cour de cassation peut entendre l’argument de la contribution aux charges du mariage. C’est d’ailleurs une approche similaire qu’elle retient également pour les couples concubins ou pacsés.
Voir sur ce sujet nos autres articles : https://www.resodinfo.fr/le-concubin-qui-paie-plus-que-sa-contribution-au-financement-immobilier-peut-il-etre-indemnise-en-cas-de-separation/
Pour consulter la décision :