Le Directeur Général d’une SAS est révoqué sans qu’il soit justifié de justes motifs. Sa révocation est-elle valable ? La Cour de cassation prend enfin une position de principe sur le sujet.
La décision
Monsieur N est révoqué de ses fonctions de mandataire social de plusieurs sociétés et notamment de Directeur Général d’une SAS. Faisant valoir que ces révocations étaient intervenues sans juste motif et dans des conditions brutales et vexatoires, il assigne la société en paiement de dommages-intérêts.
La Cour d’appel d’ANGERS, par un arrêt du 17 septembre 2019, rendu sur renvoi après cassation (chambre commerciale, financière et économique, 27 juin 2018, pourvoi n°16-10.018), le déboute.
Il forme alors un nouveau pourvoi au motif que les modalités de révocation d’un dirigeant d’une société par actions simplifiée sont en principe fixées librement par les statuts ; qu’en l’absence de mention statutaire dispensant la société de justifier d’un motif pour procéder à la révocation du dirigeant, la révocation ne peut intervenir que pour un juste motif.
La Cour de cassation, civile, Chambre commerciale, par un arrêt du 9 mars 2022, n°19-25.795, Publié au bulletin, rejette le pourvoi :
« Après avoir exactement énoncé que les conditions dans lesquelles les dirigeants d’une société par actions simplifiée peuvent être révoqués de leurs fonctions sont, dans le silence de la loi, librement fixées par les statuts, qu’il s’agisse des causes de la révocation ou de ses modalités, l’arrêt constate que l’article 18 des statuts de la société … stipule que les autres dirigeants que le président « sont révocables à tout moment par l’associé unique ou, en cas de pluralité d’associés, par l’assemblée générale ordinaire des associés sur proposition du président » et retient que, sauf à ajouter à l’article 18 précité, celui-ci ne conditionne nullement la révocation du dirigeant à l’existence de justes motifs. »
Décryptage
L’article L 227-5 du Code de commerce relatif aux dirigeants de SAS est pour le moins laconique :
« Les statuts fixent les conditions dans lesquelles la société est dirigée. »
La doctrine majoritaire en avait conclu jusqu’à présent que, à défaut de stipulation statutaire contraire, le mandataire social est révocable à tout moment sans avoir à justifier d’une quelconque raison, principalement par assimilation du mandat social au mandat de Droit commun. En effet, le mandat prend fin par la simple révocation du mandataire, à la discrétion du mandant. Il n’est nullement contraint à justifier sa décision.
La jurisprudence n’était jusqu’ici que peu significative.
La question posée ici à la Cour suprême était la suivante : lorsque les statuts de la SAS sont silencieux sur les conditions de révocation d’un mandataire social, est-elle tenue de justifier d’un juste motif pour le révoquer ?
La réponse est sans ambiguïté : non, le principe est la révocation « ad nutum ».
L’exigence d’une condition spécifique, telle par exemple que des justes motifs, ne peut trouver son origine que dans les statuts de la société.
La publication de l’arrêt au bulletin exprime une position de principe.
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