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DUTREIL ET PREPONDERANCE : QUELS CRITERES POUR LA METHODE DU FAISCEAU D’INDICES ?

Une Cour d’appel retient 7 critères pour la méthode du faisceau d’indices applicable pour déterminer la prépondérance ou non d’une activité éligible à l’article 787 B du CGI.

La décision

En 2012, M. Y hérite de 919 actions en pleine propriété et de 23 actions en nue-propriété d’une société anonyme, laquelle exploite une galerie d’art, édite des livres d’art et donne en location une partie de son patrimoine immobilier.

Dans la déclaration de succession, M. Y invoque le bénéfice de l’exonération partielle de l’article 787 B du CGI.

L’administration fiscale remet en cause l’éligibilité au dispositif Dutreil, estimant que la société avait une activité à prépondérance civile (location immobilière) au regard de son chiffre d’affaires et de son actif brut immobilisé.

La Cour d’appel – CA Paris 26 octobre 2020, n° 19/15261 – valide la position de l’administration : « Au 04 octobre 2012, jour du décès (…), le chiffre d’affaires de la société (…) provenait ainsi principalement de son activité civile. La société n’était dès lors pas éligible à l’exonération prévue à l’article 787 B du code général des impôts. ».

Le redevable forme un pourvoi invoquant le fait « qu’en s’abstenant de rechercher si la société pouvait être regardée, compte tenu d’un faisceau d’indices déterminés d’après la nature et les conditions d’exercice des activités de la société, comme exerçant une activité commerciale prépondérante, la cour a privé sa décision de base légale au regard de l’article 787 B du code général des impôts. »

La Cour de cassation – Cass. com., 25 janvier 2023, n° 20-23.137, Inédit – casse l’arrêt :

« En se déterminant ainsi, au regard de la part du chiffre d’affaires de la société générée par son activité civile et de la proportion des actifs réévalués affectée à cette même activité, sans examiner, comme elle y était invitée, les autres indices fondés sur la nature de l’activité de la société et les conditions de son exercice, invoqués par M. [H] au soutien du caractère principalement commercial de l’activité de la société, la cour d’appel n’a pas donné de base légale à sa décision. »

La Cour d’appel de Versailles 12 mars 2024, RG n° 23/01551, statuant sur renvoi, écarte la prépondérance de l’activité commerciale :

« Ainsi, il résulte de l’ensemble de ces éléments (notamment de l’examen de la valeur vénale des actifs et de la part du chiffre d’affaires affectées à l’activité commerciale) que l’activité commerciale de la société (…) n’est pas exercée à titre prépondérant.
Par voie de conséquence, la transmission des parts sociales de cette société n’était pas éligible à l’exonération prévue à l’article 787 B du code général des impôts.
C’est donc à bon droit que les premiers juges ont rejeté les prétentions de M. [Y] et confirmé la décision implicite de rejet de l’administration fiscale. »

Pour consulter la décision : https://www.courdecassation.fr/decision/65f1519d28057200093c44ed?search_api_fulltext=pr%C3%A9pond%C3%A9rance&op=Rechercher&date_du=&date_au=&judilibre_juridiction=ca&judilibre_siege_ca%5B0%5D=ca_versailles&previousdecisionpage=&previousdecisionindex=&nextdecisionpage=0&nextdecisionindex=1

Décryptage

Les titres d’une société ayant une activité industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale, transmis par décès ou entre vifs peuvent être exonérés de droits de mutation à titre gratuit, à concurrence de 75 % de leur valeur, sous réserve du respect de diverses conditions (article 787 B du CGI).

Il est admis, tant par la doctrine administrative que par la jurisprudence, que ce régime de faveur s’applique aussi à la transmission de titres de « sociétés mixtes » qui, ayant pour partie une activité civile autre qu’agricole ou libérale (et donc non éligible au dispositif Dutreil), exercent principalement une activité éligible (industrielle, commerciale, artisanale, agricole ou libérale).

La loi de finance pour 2024 a légalisé ce principe de prépondérance.

Mais comment déterminer si une activité est prépondérante ?

Après des errements, doctrine et jurisprudence s’accordent sur le fait que le caractère prépondérant de l’activité éligible s’apprécie en considération d’un faisceau d’indices déterminés d’après la nature de l’activité et les conditions de son exercice.

En l’espèce, la Cour d’appel de PARIS s’était basée sur le chiffre d’affaires et la proportion des actifs réévalués affectés à l’activité non éligible pour écarter la prépondérance de l’activité éligible et donc l’éligibilité à l’exonération Dutreil.

Cet arrêt a été cassé par la Cour de cassation qui a rappelé le principe : il faut appliquer la méthode du faisceau d’indices.

La Cour d’appel de renvoi prend soin de ne pas se restreindre aux seuls chiffre d’affaires et proportion d’actifs réévalués et procède à l’examen de 7 critères/indices.

Elle conclut, au vu de l’ensemble de ces éléments, que l’activité commerciale de la société n’était pas exercée à titre prépondérant et que par conséquent la transmission des titres de cette société n’était pas éligible à l’exonération prévue à l’article 787 B du CGI.

Notons que parmi les 7 critères retenus par la Cour d’appel figurent la valeur vénale des actifs et de la part du chiffre d’affaires affectées à l’activité commerciale. Il nous semble qu’effectivement, même si ces critères ne pas suffisants en eux-mêmes, il n’y a pas lieu de les exclure au titre de la méthode du faisceau d’indices, au contraire.

Vous retrouverez le détail des critères retenus dans la prochaine mise à jour de notre ouvrage « LE PRATICIEN FACE AU DUTREIL » :

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